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Connecté à vie : notre cerveau, le meilleur des réseaux (2/3)

cerveau, développement

Connecté à vie : notre cerveau, le meilleur des réseaux (2/3)
L'idée encore largement répandue selon laquelle le cerveau n'évolue plus après la naissance (sauf pour perdre des cellules) est définitivement révolue. Les réseaux neuronaux développés pendant la vie embryonnaire restent au contraire très plastiques et sont le jeu de remodelages incessants. Ces remodelages permettent les ré-ajustements nécessaires pour adapter nos comportements aux modifications permanentes de notre environnement. Deux évènements contribuent à cette dynamique : la plasticité des synapses et le renouvellement de certains neurones par un processus dit de neurogenèse adulte.

Copyright CNRS Photothèque/Université de Strasbourg - GRIGIS Antoine, mise en évidence par IRM (imagerie par résonance magnétique) de faisceaux de substance blanche dans un cerveau humain.

Deuxième "épisode"
Comment ne pas user son cerveau ?

La plasticité du cerveau

Au même titre que le cerveau embryonnaire se débarasse d'un surplus de neurones « non cablés », le cerveau sélectionne les synapses les plus actives et donc les plus indispensables à son activité. Une quantité excessive de synapses peut en effet nuire à la qualité de la transmission de l'information car celles qui ne sont pas porteuses de sens produisent un bruit de fond parasite et gaspillent de l'énergie. Les synapses inutiles, reépérables par leur faible activité, sont sélectivement éliminées de façon à permettre aux neurones d'établir de nouveaux contacts. A l'inverse, les synapses activées de façon régulière sont consolidées. C'est cette capacité à moduler la combinaison des connexions entre neurones que l'on nomme plasticité

Développement de connections entre les neurones chez l'enfant

Source : Muséum de Marseilles

 

Elle est indispensable à l'acquisition de nouveaux apprentissages et à l'entretien de nos capacités de réflexion et d'imagination. Cette plasticité synaptique est maximale chez l'enfant mais elle est persiste chez l'adulte à condition de l'entrainer par des exercices cognitifs. Grâce au processus de consolidation, les réseaux qui sont les plus fréquemment sollicités sont ceux qui persistent le plus longtemps. Pour cette raison, nous gardons souvent une meilleure mémoire des souvenirs anciens et des acquis issus d'apprentissages par répétition.

 

La plasticité synaptique a également d'autres atouts

la capacité que développent les aveugles à voir avec leur mainsPar exemple, elle est à l'origine de la capacité que développent les aveugles à voir avec leur mains. Elle est aussi nécessaire à notre bon équilibre mental. On sait en effet aujourd'hui que les stress récurrents conduisent à une forte réduction de la plasticité synaptique et sont à l'origine de la dépression chez l'adulte. Si ces stress sont subis avant la naissance ou pendant la période périnatale, ils peuvent entraîner des troubles cognitifs et comportementaux.

Ccc by-nc-nd Hé'louïse.

 

 

Pour en savoir plus

Les pharmacologues se sont bien sûr penchés sur les mécanismes cellulaires qui permettent d'entretenir cette plasticité. Il est apparu que le maintien ou l'élimination d'une synapse repose sur un changement dans le choix du repertoire de gènes exprimé par la cellule en réponse aux signaux qu'elle perçoit de ses voisines. Le renforcement permet ainsi d'augmenter la production des molécules nécessaires à la transmission de l'influx nerveux au niveau des synapses. A l'inverse, la disparition de synapses est liée à une forte réduction de la production de ces mêmes molécules. Pour cette raison, de nombreux médicaments comme les anti-dépresseurs sont des agents qui miment les processus de renforcement.

 

La neurogénèse adulte : un domaine encore largement méconnu

La neurogenèse adulte consiste en la production de jeunes neurones à partir d'un petit réservoir de cellules souches qui persistent, après la naissance, dans la profondeur des hémisphères. La réintroduction de jeunes neurones dans le cerveau adulte ne peut pas se faire comme lors du développement du cerveau embryonnaire car il sagit chez l'adulte d'incorporer les nouvelles cellules au sein de réseaux pré-existants sans en perturber le fonctionnement. C'est donc ces réseaux déjà installés qui, en produisant des signaux attractifs ou répulsifs, vont guider les nouvelles cellules tout au long du trajet vers leur lieu d'implantation définitive.
 

Dans la dernière partie de cette trilogie, nous verrons comment les travaux sur la neurogenèse adulte ouvrent de nouvelles pistes vers le traitement des pathologies neurodégénératives, maladies très invalidantes et qui affectent une population sans cesse croissante.


Article rédigé par Valérie Mils, Maître conférence en Biologie Cellulaire - Centre de Biologie du développement  - Université Paul Sabatier à Toulouse.