
Un aperçu de quelques thématiques où les idées reçues ont la vie bien dure
Des néo-ruraux pleins d'expérience
Benjamin, doctorant au laboratoire d'anthropologie à l'Université Jean Jaurès (Mirail, Toulouse), en sait long sur ce qu'on appelle les néo-ruraux. Non, il ne s'agit pas de « néo-hippies », idéalistes et inexpérimentés. Ces jeunes agriculteurs sont des parfaits auto-entrepreneurs, diplômés d'écoles d'agriculture et conscients de toutes les difficultés du métier. Leur projet d'installation est très minutieusement préparé. Une fois sur place, ils tissent un réseau de relations de sorte à s'intégrer sans heurts dans le tissu de professionnels préétablis. Leur vocation : favoriser une production et une distribution locales donc à moindre coût carbone, donc moins polluantes tout en améliorant la qualité des produits.
Ce choix de vie fait fi de la classique division sociale du travail permettant une séparation très claire entre vies professionnelle et personnelle. Mais c'est le cas dans tout le monde agricole et pour ces « néo-ruraux », c'est souvent une motivation supplémentaire.
Benjamin sait de quoi il parle : il réalise son travail d'enquête sur le terrain en tant qu'ouvrier agricole entouré de ses « sujets d'observation » dans les fermes qu'il a préalablement sélectionnées. Entre travail aux champs, aux étables et discussions plus formelles, son activité est riche d'enseignements sur ce nouveau « peuple des champs ».
Benjamin "L'agriculture biologique pourrait-elle nourrir toute l'humanité ?"
Vous avez dit : le bon air de la montagne ?
La louable reconversion des néo-ruraux vers une agriculture plus raisonnée portera-t-elle ses fruits ? Leurs efforts risquent d'être compromis par la pollution omniprésente : Marion, doctorante au Laboratoire « Evolution et Diversité Biologique », nous explique que les microparticules azotées issues des rejets industriels et automobiles se déplacent avec les vents et retombent beaucoup plus loin, jusque dans les prairies d'altitude, dont l'air ne serait donc pas aussi pur qu'on le croit.
La mission de Marion est de collecter les preuves de la toxicité de ces dépôts azotés. La première approche, empirique, consiste à consigner régulièrement le bilan écologique de parcelles réparties sur le massif pyrénéen. Elle fait aussi de la « bio-surveillance » en étudiant les lichens qui sont de véritables « éponges naturelles » d'azote. Une dernière approche, plus expérimentale, consiste à inoculer différents produits azotés dans de petites zones de terrain protégées (placettes) puis d'étudier la réaction locale de la flore et de la faune. Espérons que les résultats ne soient pas trop alarmants. On ne voudrait pas oublier cette « douce France » chantée lorsque les industries pétrolières et voitures n'étaient pas encore omniprésentes dans le paysage.
Photo : des lichens de toutes formes et couleurs pour mesurer la pollution Copyrigt Marion Boutin, EDB
Chimères végétales : art, science et fiction
Raphael, doctorant en arts plastiques à l'Université Jean Jaurès (Mirail, Toulouse) commente des images tirées de l'exposition « Alive » (Paris, 2014). C'est beau et un peu inquiétant à la fois. Des plantes apparaissent, fusionnées à de la dentelle ou d'autres matières. Imaginez, Madame que vos géraniums tissent vos bas directement dans le pot de fleur. Idiot me direz-vous ? Pas tant que ca : on utilise déjà des chèvres pour produire de la soie d'araignée et des bactéries pour fabriquer des protéines humaines ! On arrive même aujourd'hui à synthétiser en laboratoire, ex nihilo, un virus ou une bactérie parfaitement viable. Les progrès du génie génétique ouvrent des horizons que même Jules Vernes n'avait pas imaginés. En fait, l'objectif de Raphaël est de nous alerter, en s'appuyant sur les œuvres de différents artistes, sur l'étendue des impacts que les applications scientifiques pourraient avoir à terme sur notre quotidien. L'artiste a donc un rôle à jouer sur la façon dont le public va percevoir le progrès scientifique. Pour son projet de plantes virtuelles dont la croissance dépend de l'humidité, de la luminosité et de la température, Raphaël a déjà eu le soutien de chercheurs en informatique et souhaite maintenant le développer avec des biologistes.
Vidéo. Ce jardin cybernétique propose une expérience fictive à la fois ludique et inquiétante. Il renvoie en effet aux possibilités de manipulations à venir dans le domaine de l'hybridation des êtres vivants.
Une histoire de spermatozoïdes … et de cochon

Photo : des spermatozoïdes aux formes et tailles variées. Il y en a pour tous les goûts !
Alors que fait monsieur spermato devant cette cible tant convoitée ? En bon gentleman, il se déshabille c'est à dire qu'il abandonne en entrant son costume cellulaire et seul son noyau passe la membrane. Mais cela ne suffit pas. Au même titre qu'on oublie sa journée de boulot en rentrant à la maison, le noyau procède en entrant au reset complet de son histoire de spermatozoïde. En d'autres termes, il efface tous les souvenirs inscrits dans son ADN sous forme d'empreintes chimiques. En principe, cette reprogrammation se fait sans problème.

Cependant, Annabelle, doctorante à l'INRA, craint qu'à l'instar de ce qui se passe chez l'homme où la mauvaise qualité des spermatozoïdes peut être corrélée à une mauvaise empreinte, l'efficacité de cette reprogrammation puisse aussi être altérée chez certains porcs sélectionnés pour la reproduction. Du coup, leur pouvoir fécondant diminuerait…ce n'est pas vraiment le but recherché !
Photo : tout n'est pas inscrit définitivement dans l'ADN.

Photo : Quand les cellules intestinales « ingèrent » des mycotoxines », le cochon va mal.
Mais monsieur cochon est un individu décidemment bien vulnérable. Après le stress qui le rend stérile, voilà des champignons qui le rendent anorexique. Ce champignon (au doux nom de
Fusarium graminearum) se développe sur les céréales destinées à son alimentation et produit une mycotoxine qui semble couper l'appétit des cochons. La molécule a été identifiée. Alix, également doctorante à l'INRA, pense qu'elle pourrait agir en perturbant le système endocrinien de l'animal, y compris certaines hormones impliquées dans le contrôle de la prise alimentaire. Bref, voilà notre cochon qui maigrit, devient dépressif… Un constat bien alarmant pour les amateurs de saucisses !!!
Inoffensives nanoparticules ?
On en a tous entendu parler sans toujours savoir de quoi il s'agit. Sans doute parce qu'elles restent invisibles à l'œil nu…et pourtant leurs domaines d'applications sont de plus en plus variés: pneumatique, aéronautique, cosmétiques, jusqu'au médical et l'alimentaire. Difficile de les repérer sur les étiquettes d'emballages : grâce à une législation encore mal définie elles sont bien souvent camouflées en «solutions colloïdales» ou autres «sels » … Pierre du LPCNO (Laboratoire de Physique et Chimie des Nano-Objets) qui en manipule tous les jours reste prudent quant à leur usage. Du fait de leur petite taille, les nanoparticules s'infiltrent facilement partout : elles passent par exemple à travers de simples gants de protection et peuvent, une fois dans l'organisme, traverser aisément certaines de nos barrières physiologiques…

Un bel avenir donc pour les nanoparticules à condition de maitriser leur propension à la dissémination et surtout de mieux comprendre leurs effets à long terme sur les organismes et l'environnement.
Photo. On trouve des nanoparticules partout, y compris dans les pansements
Il y avait encore bien d'autres choses passionnantes à découvrir avec Emeline, Julien, Sophie et Caroline.... allant des cellules sanguines, à la peau en passant par cerveau ...dommage si vous les avez loupés, mais vous pourrez vous rattraper lors d'une prochaine journée consacrée à nos jeunes chercheurs"
Biographie et webographie à télécharger en format.pdf ici :
http://bit.ly/1lHH5DN
Article rédigé par Dominique Morello et Valérie Mils - Muséum de Toulouse. Mis en ligne le 29 avril 2014.