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Biodiversité

Les papillons vus par le bout de la lorgnette...

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Les papillons vus par le bout de la lorgnette...
Emblématiques de la biodiversité, les papillons font partie des insectes révélateurs de la santé des milieux naturels. Leur recensement permet de repérer les espèces en voie de disparition et, de fait, les écosystèmes en danger. C'est d'ailleurs ce que vous propose de faire le programme Observatoire des Papillons de Jardin (à l'initiative du Muséum National et de l'association Noé Conservation). Le Muséum de Toulouse est partenaire de cette opération, il organise des réunions d'information locales. C'est l'occasion pour notre entomologiste, Philippe Annoyer, de zoomer sur cet insecte, considéré comme l'un des plus beaux animaux mais trop souvent méconnu...

Papillon La Belle Dame, Vanessa cardui cc by-nc-nd Phil du Valois

Qui est vraiment le papillon ?

papillon des jardins cc by-nc-nd Phil du valois, membre du groupe flickr Collectionner le Vivant autrement

La Piéride du navet, Pieris napi cc by-nc-nd Phil du Valois, membre du groupe Flickr Collectionner le Vivant autrement

Les papillons font partie de la Classe des Insectes. Ils sont donc pourvus d'un derme dur ou cuticule qui compose un squelette externe, d'un corps composé de trois parties, de trois paires de pattes, d'une paire d'antennes, de joints articulaires souples pour se mouvoir et d'a iles membraneuses plus ou moins développées.
 
Les papillons sont appelés par les scientifiques les Lépidoptères (littéralement « ailes écailleuses »). Leurs ailes sont plus ou moins recouvertes d'écailles microscopiques qui les aident au vol : « accrochant » l'air, elles permettent une meilleure portance  et donc un gain d'énergie.
Attention, les papillons ne sont pas « poilus » : cet aspect est dû à certaines écailles qui se sont différenciées en s'allongeant  pour former des soies.
Chez les mâles, certaines sont même porteuses de phéromones : les androconies.
 

Une histoire ancienne et une colonisation exceptionnelle 

Prodryas persephoneLe plus ancien fossile d'Insecte connu est daté de 396 à 407 Ma (Dévonien). Les papillons quant à eux sont apparus bien plus tard. Ils ont coévolué avec les plantes à fleurs.
Le papillon fossile le plus ancien (Archaeolepis mane) a été trouvé en Angleterre et est daté de 190 Ma (Jurassique inférieur) mais la majorité des fossiles connus sont plus récents (dans l'ambre notamment).
Les fossiles de papillons sont rares et ceux de papillons de jour (Rhopalocères) encore plus. Le premier spécimen, Prodryas persephone, datant de 35 Ma (Éocène) a été découvert dans le gisement fossilifère de Florissant aux Etats-Unis.
 
Aujourd'hui, 165 000 espèces ont été décrites dans le monde et 10 % des espèces animales connues sont des papillons. La France accueille près de 5 000 espèces différentes même si c'est dans la zone tropicale qu'ils sont le plus nombreux. Ils ont colonisé tous les milieux ; seul le continent Antarctique ne compte aucun représentant.
 
Prodryas persephone. Gravure du fossile de Prodryas persephone, à partir d'une annonce dans entomologiste canadien,Samuel Hubbard Scudder 1887, via wikimedia

Un maillon essentiel de la biodiversité mais pas que...

papillon des jardins cc by nc sa fabdelaz, membre du groupe Flickr Collectionner le Vivant autrement
La Piéride du navet,  Pieris napi  cc by-nc-sa fabdelaz, membre du groupe Flickr Collectionner le Vivant autrement
 
Dans la nature, les papillons participent à la pollinisation des fleurs perpétuant ainsi les espèces végétales. Ils sont un maillon essentiel de la chaîne alimentaire et contribuent à nourrir quantités d'espèces animales. 
Mais contrairement aux idées reçues, ils n'aspirent pas que le nectar des fleurs. Tout ce qui est sucré ou salé les intéresse (fruits en décomposition, transpiration, urines, excréments). Les papillons possèdent une trompe pour se nourrir : les maxilles inférieurs de la chenille s'allongent pendant la métamorphose pour former une trompe chez le papillon. A l'état larvaire, les chenilles dégradent les matières végétales et animales et favorisent le renouvellement végétal.
Acteurs de la biodiversité, ces insectes jouent également un rôle dans l'économie mondiale. Depuis 2600 ans avant JC, l'homme a domestiqué le Bombyx du mûrier pour produire de la soie. D'un point de vue alimentaire, de nombreuses populations dans le monde consomment des chenilles ou des chrysalides séchées, bouillies, grillées ou fumées. Dans certains pays, les récoltes se chiffrent en dizaines de tonnes.
 

Pourquoi les observer en particulier ?

papillon cc by-sa-nc Le NO, membre du groupe Flickr Collectionner le Vivant autrement
 
Bio indicateurs, les papillons sont étroitement liés à la santé des milieux  naturels. Leur grande diversité et leurs exigences écologiques variées (habitats et plantes hôtes spécifiques) permet, en étudiant l'état des populations, de connaître fidèlement  le niveau de qualité des milieux naturels. Une espèce qui décroît et disparaît est donc le signe d'un écosystème très perturbé.
 
Avec la perte d'habitats, les insecticides, le changement climatique, la raréfaction des plantes hôtes, les éclairages publics, la circulation automobile, etc., de nombreuses espèces et populations sont en déclin. Depuis 25 ans, en Europe, 11 % des espèces de papillons auraient disparu. En Grande-Bretagne, le déclin est particulièrement important avec 70 % d'espèces.
 
Plusieurs centaines d'espèces sont protégées dans le monde dont 24 en France.
 
Afin d'aider à mieux les connaître et ainsi les protéger, chacun peut devenir acteur de l'Observatoire des Papillons de Jardin, un programme permettant à chacun, qu'il soit scientifique ou simple citoyen de relayer ses observations auprès des scientifiques. À terme, c'est un véritable réseau de surveillance des espèces communes de papillons qui se met en place, pour suivre l'évolution des populations et mieux comprendre les dynamiques écologiques, en lien avec les changements climatiques par exemple. 
 

En savoir plus sur l'Observatoire des papillons avec l' association de sauvegarde de la biodiversité   Noé conservation.
 
Article Philippe Annoyer, responsable des collections d'Entomologie au Muséum de Toulouse. Mis en ligne le 26 mai 2014 à l'occasion de la première réunion publique sur l'Observatoire des papillons.